vendredi 24 mai 2013

"Lorsqu'en voyageant dans la presqu'île armoricaine on dépasse la région, plus rapprochée du continent, où se prolonge la physionomie gaie, mais commune, de la Normandie et du Maine, et qu'on entre dans la véritable Bretagne, dans celle qui mérite ce nom par la langue et la race, le plus brusque changement se fait sentir tout à coup. Un vent froid, plein de vague et de tristesse, s'élève et transporte l'âme vers d'autres pensées ; le sommet des arbres se dépouille et se tord ; la bruyère étend au loin sa teinte uniforme ; le granit perce à chaque pas un sol trop maigre pour le revêtir ; une mer presque toujours sombre forme à l'horizon un cercle d'éternels gémissements. Même contraste dans les hommes : à la vulgarité normande, à une population grasse et plantureuse, contente de vivre, pleine de ses intérêts, égoïste comme tous ceux dont l'habitude est de jouir, succède une race timide, réservée, vivant toute au dedans, pesante en apparence, mais sentant profondément et portant dans ses instincts religieux une adorable délicatesse."




mercredi 22 mai 2013

" Et des files de pèlerins se succèdent sans trêve. On prie Notre-Dame pour l'extension des affaires; on la supplie d'ouvrir de nouveaux débouchés aux saucissons et aux soies. On fait l'article à la Vierge; on la consulte sur les moyens de vendre des denrées défraîchies et d'écouler les pannes. Au centre de la ville même, dans l'église de Saint-Boniface, j'ai relevé une pancarte où l'on invite les fidèles à ne pas distribuer, par respect pour le Saint Lieu, d'aumônes aux pauvres. Il ne convenait pas, en effet, que les oraisons commerciales fussent troublées par les ridicules plaintes des indigents!

- Oui, dit Durtal, et ce qui est bien étrange aussi, c'est que la démocratie est l'adversaire le plus acharné du pauvre. La Révolution, qui semblait, n'est-ce pas, devoir le protéger, s'est montrée pour lui le plus cruel des régimes. Je te ferai parcourir un jour, un décret de l'an II; non seulement, il prononce des peines contre ceux qui tendent la main, mais encore contre ceux qui donnent! "



vendredi 17 mai 2013

« Je ne parle pas pour les faibles qui veulent obéir et tombent à bras raccourcis sur l'esclavage. En présence de la nature inexorable, nous sentons que nous sommes nous-mêmes partie de cette nature inexorable. Mais j'ai trouvé la force où on ne la cherche pas, chez des hommes simples, doux et obligeants, sans le moindre penchant à la domination - et inversement le goût de dominer m'est souvent apparu comme un signe de faiblesse intime ; ils craignent leur âme d'esclave et la drapent d'un manteau royal (ils finissent pas devenir esclaves de leurs partisans, de leur réputation, etc). Les natures puissantes règnent, c'est une nécessité, sans avoir besoin de lever le doigt, dussent-elles, de leur vivant, s'enterrer dans une chaumière. »



dimanche 12 mai 2013

samedi 4 mai 2013




« Mais il faut s'accrocher à cette vérité historique, la défendre contre l'actualité et l'apparence et n'en pas démordre : la noblesse européenne, -la noblesse du sentiment, du goût, des mœurs, bref la noblesse dans tous les sens élevés du mot,- est l’œuvre et l'invention de la France ; la vulgarité européenne, la médiocrité plébéienne des idées modernes est l’œuvre de l'Angleterre. »




« L'Ecriture Sainte témoigne que Notre Seigneur fit le Paradis terrestre, qu'il y mit l'arbre de vie et que de là sort une source d'où naissent en ce monde quatre fleuves principaux : le Gange aux Indes, le Tigre et l'Euphrate, lesquels séparent les montagnes, forment la Mésopotamie et coulent ensuite en Perse, et le Nil qui naît en Ethiopie et se jette dans la mer à Alexandrie. Je ne trouve pas ni n'ai jamais trouvé un écrit des Latins ou des Grecs qui, d'une manière certaine, dise en quel point de ce monde est le Paradis terrestre. Je ne l'ai vu non plus sur aucune mappemonde, sinon situé avec autorité d'argument. Certains le plaçaient là où sont les sources du Nil, en Ethiopie, mais d'autres parcoururent toutes ces terres et n'y trouvèrent ni la température ni l'élévation vers le ciel telles qu'ils pussent admettre qu'il était là et que les eaux du déluge y fussent arrivées qui le recouvrirent. [...] Je suis convaincu que là est le Paradis terrestre, où personne ne peut arriver si ce n'est par la volonté divine. »

Christophe Colomb, Troisième voyage aux Indes