jeudi 18 avril 2013

Le Fou magnifique

Je ne voudrais pas quitter cette cohorte de penseurs, d'écrivains et d'artistes solitaires sans évoquer Miguel de Cervantès (1547-1616) dont l'existence fut mêlée aux batailles et aux gloires de son siècle et qui inventa le personnage de Don Quichotte, raillé et incompris, si seul parmi la foule des bien-pensants.

Quand de nos jours on parcourt, non avec Rossinante mais avec des chevaux-vapeur, la longue, l'interminable plaine de la Manche, on comprends ici que le temps n'a guère plus de signification que dans un désert de sable. Tout peut surgir : le mirage (les moulins à vent devenant des combattants ennemis), l'épopée, l'indicible soif d'amour. Et il semble naturel qu'à ce désert d'Espagne s'accorde la figure ascétique et nomade de Don Quichotte, juché sur son cheval maigre.

« En el lugar de la Mancha... », « Dans une bourgade de la Manche, dont je ne veux pas me rappeler le nom... » Ainsi commence un des livres les plus énigmatiques et les plus fous de la littérature. Ce lieu que Cervantès ne tient pas à nommer s'appelle aujourd'hui Argamasillo el Alba et c'est en ce bourg innommable, autant dire infâme, qu'il fut emprisonné. C'est là aussi qu'il conçut son chef d’œuvre et en écrivit les premiers chapitres. A la manière dont Jean de la Croix avait pris son envol mystique à partir du cachot de Tolède, Cervantès imagina, dans cette sinistre geôle au cœur d'une plaine désespérante, une oasis pour se rafraîchir et se désaltérer. Jailli de son cerveau et de sa plume, l'ingénieux hidalgo passerait son temps à combattre l'injustice et secourir les faibles, à rêver, à aimer d'impossible amour une irréelle Dulcinée...

Soldat autant que poète, vaillant autant que cultivé, Cervantès a participé en 1571 à la bataille navale de Lépante où il perd l'usage de la main gauche. Quelques temps après, il est captif du roi d'Alger pendant cinq ans. De retour en Espagne, il écrit des poèmes et de nombreuses pièces de théâtre, malgré la rivalité de Lope de Vega. A partir de 1587 il commence une autre vie, il devient commissaire aux vivres puis collecteur d'impôts. A ce titre il parcourt l'Andalousie, la région de Séville puis de Grenade, la plaine interminable de la Manche. Il parle de blé, d'orge ; d'huile, de vin et d'olives avec les gens du peuple qu'il rencontre, qu'il rançonne sans doute. A plusieurs reprises, il est emprisonné et même excommunié pour des raisons diverses, souvent obscures : on l'accuse d'avoir détourné des vivres à son profit, de mal faire son travail...En 1600, le voici donc incarcéré, une fois de plus. Et Cervantès convoque Don Quichotte pour prendre sa revanche sur l'ordinaire vie.

Représentons-nous un instant cet homme, Miguel de Cervantès, naguère fier soldat et dramaturge reconnu, qui a désormais la tâche ingrate de lever des impôts. Il sillonne le pays, il se heurte à des portes closes et des visages fermés. Le temps paraît interminable et le ciel pèse de tout son poids sur la plaine où il semble errer. Imaginons ensuite qu'on injurie cet homme au métier bien impopulaire, qu'on lui cherche pouilles et qu'on le jette dans la geôle d'un village aussi morne et hostile que les précédents. A ce tableau peuvent s'ajouter des soucis de ménage, la mort de quelques proches et celle, récente, du roi Philippe II (en 1598). Tant d'épreuves, tant de déceptions, et cette humidité malsaine qui imprègne les murs de sa cellule.

Le salut ne peut venir que de la culture (chers livres, bienheureuse philosophie), de la création artistique conçue comme un rêve démesuré, et aussi de l'amitié (Sancho Pança, fidèle écuyer de Don Quichotte), et de l'amour inaccessible et doux que figure Dulcinée du Tobosco.

Lui, Don Quichotte, ne va pas rançonner ni attrister les habitants du pays. Bien au contraire, il les aide, ils les allège, il les fait rire, même à ses dépens. Il s'est donné pour sainte mission de pratiquer la charité et la justice parmi ses frères humains et d'ainsi faire revenir les temps chevaleresques et advenir la Jérusalem céleste. Dès le départ, la solitude du héros est manifeste puisqu'il se déclare chevalier errant, c'est-à-dire possesseur d’aucune terre : « Voilà pourquoi je vais par ces solitudes et ses déserts, cherchant les aventures, bien déterminé à risquer mon bras et ma vie dans la plus périlleuse que puisse m'envoyer le sort, si c'est au secours des faibles et des affligés. »

Par la noblesse de son aventure dénigrée par ses contemporains, par ses nombreuses vertus qu'il compare à celle du moine chartreux, Don Quichotte est un être à part, étranger en son pays et exilé de son époque. Malgré l'amitié solide de Sancho, malgré la compagnie du cheval nommé Rossinante et malgré la présence de Dulcinée en son cœur, Don Quichotte éprouve un sentiment tragique de solitude du à son idéalisme. Ce chevalier ascétique et inquiet qui se fait le défenseur du Bien, de la sagesse, de l'amour héroïque éveille peu d'échos chez ceux qui le rencontre. Mais il persiste dans sa folie. Les hommes peureux, à la raison étriquée, à l'épais bon sens, ne le détournent pas de sa voie solitaire. Don Quichotte ne s'affronte pas au monde mais à l'absolu. Ce qui le garde et le requiert, c'est la lumière de l'âme. Sa solitude est une solitude qui vielle : « Je suis obligé, suivant l'ordre de la chevalerie errante, où j'ai fait profession, de vivre toujours en alerte et d'être, à toute heure, sentinelle de moi-même.

Il y a ceux qui vivent dans le quotidien et ceux qui avancent dans le Réel. Ces derniers sont le plus souvent seuls. La foule ne les écoute pas, se moque d'eux, leur jette des pierres. Devant eux il n'y a que l'interminable plaine de la Manche. Ou l'Immense.


 

jeudi 11 avril 2013

"Devenez donc les imitateurs de Dieu, comme des enfants bien-aimés; et marchez dans la charité, à l’exemple de Christ, qui nous a aimés, et qui s’est livré lui-même à Dieu pour nous comme une offrande et un sacrifice de bonne odeur."

 La Bible, Ephésiens 5:1-2.




 

samedi 6 avril 2013

« Je veux affirmer que je ne suis pas, et que je n’ai jamais été, pour établir en quoi que ce soit une égalité politique et sociale entre les Blancs et les Noirs. Que je ne suis pas, et que je n’ai jamais été, pour faire des Nègres des électeurs ou des jurés, ni pour leur permettre d’avoir des bureaux ou pour se marier avec des Blancs. J’ajouterai qu’il y a une différence physique entre la race blanche et la race noire qui, je le crois, interdira à jamais à ces deux races de vivre ensemble en terme d’égalité sociale et politique. Et comme ils ne peuvent vivre ainsi, tant que Blancs et Noirs se côtoieront, il devra y avoir une relation de supérieur à inférieur. Et moi, plus que n’importe qui, je suis pour que cette supériorité soit assignée à la race blanche. »

jeudi 4 avril 2013






































- Halte! s'écria Narcisse avec vivacité. Ne sais-tu pas, mon ami, que pour beaucoup de pieux moines ce fut là un exercice préliminaire indispensable? Ne sais-tu pas que l'une des voies les plus courtes qui mènent à la sainteté, c'est la vie débauchée?